Tribune parue dans Le Monde,
édition du 5 mai 2020
À l’initiative de Jean-Laurent Bonnafé, Administrateur Directeur général de BNP Paribas et Président d’EpE, plus de quatre-vingt-dix dirigeants d’entreprises françaises et internationales appellent à une mobilisation collective pour faire de la relance économique un accélérateur de la transition écologique.
Au cours des dernières semaines, des moyens d’ampleur inédite ont été mobilisés pour faire face à la crise sans précédent déclenchée par le Covid-19. En plus des impacts sanitaires, les conséquences sociales et économiques sont désormais tangibles pour tous les Français. Il s’agit aujourd’hui d’en limiter les effets, notamment par la mobilisation de moyens financiers pour assurer la capacité des entreprises de notre pays à rebondir de façon inclusive et résiliente. Nous saluons les décisions rapides et massives prises par le gouvernement français et la solidarité du monde économique.
Cette épreuve intervient à un moment où la transformation de notre économie s’engageait en réponse aux enjeux du dérèglement climatique et de la perte de la biodiversité, pour prévenir d’autres crises majeures annoncées par la communauté scientifique. Nous gardons nos ambitions collectives en matière de transition écologique, et réaffirmons les engagements pris depuis plusieurs années, la continuité de cet effort est une condition de sa réussite.
Pour cela, une large part des moyens financiers qui seront prochainement mobilisés pour la relance économique aurait tout intérêt à l’être dans les directions qui avaient été précédemment identifiées pour accompagner la transition écologique[1], avec un souci encore plus affirmé de la justice sociale.
Nous croyons qu’il est aujourd’hui possible de faire de ces moyens financiers un accélérateur d’une relance verte et inclusive. Les plans de relance à venir constituent autant d’opportunités pour que les investissements nécessaires confortent les trajectoires de transformation.
La première opportunité repose sur un soutien renforcé sur le court et moyen terme aux secteurs qui permettent de mobiliser des emplois nombreux et contribuent à la préservation de l’environnement, avec au premier chef :
- la rénovation énergétique des logements et bâtiments, tertiaires publics et privés,
- le développement des mobilités décarbonées, des véhicules électriques, des infrastructures de mobilités douces et des transports en commun,
- l’expansion et le stockage des énergies renouvelables et décarbonées, électriques ou chaleur.
Dans ces secteurs, tout effort financier public est un puissant levier pour l’investissement privé, ce qui en fait les meilleurs candidats pour une relance précoce.
Tous les secteurs progressent sur leur trajectoire de décarbonation. La seconde opportunité consiste à rendre nos outils industriels en Europe plus résilients, les décarboner et réduire notre empreinte carbone, la crise ayant aussi révélé la vulnérabilité des chaînes de valeur mondialisées. Le développement d’une économie plus circulaire et celui d’une alimentation plus durable et plus locale, qui sont l’objet d’une forte demande de nos concitoyens, participent à cette seconde opportunité.
La troisième opportunité, qui produira des effets massifs à moyen et long terme, consiste à démultiplier les efforts de recherche, d’innovation, de démonstrateurs industriels et d’industrialisation de solutions d’avenir : parmi beaucoup d’autres, la bioéconomie et l’hydrogène et leurs usages pour les transports terrestres et aérien, la réutilisation de gaz carbonique sont déjà bien identifiés pour être encouragés.
Les bénéfices de ces investissements verts amélioreront la qualité de l’air, la santé des habitants et la qualité de vie dans les villes. Réussir ce plan d’urgence nous donnera aussi une forte légitimité pour tirer pleinement parti du prochain Pacte Vert européen.
Au-delà du court terme, le traitement de la crise doit se prolonger par une mobilisation de l’intelligence collective sur le monde d’après cette pandémie, avec des transformations plus profondes à envisager dans nos façons de produire et nos modèles d’affaires, des changements de comportements de consommation et de modes de vie, un rapport à la nature à revoir. Nous engageons déjà cette réflexion pour que la reprise économique se fasse sur des trajectoires durables et résilientes.
En nous mobilisant collectivement, nous pourrons préserver la santé de nos concitoyens et relancer nos outils de travail ; nous saurons accomplir les transformations nécessaires pour assurer à nos enfants une planète vivable et une prospérité humaine, économique et sociale. Faisons des épreuves actuelles que nous affrontons ensemble une opportunité pour tous, mettons l’environnement au cœur du rebond collectif.
[1] Voir en particulier la SNBC et l’étude ZEN 2050, Imaginer et construire une France neutre en carbone en 2050, 2019.
SIGNATAIRES
Patrick André, Vesuvius ; Bernard Arnault, LVMH ; Jacques Aschenbroich, Valeo ; Patrick Berard, Rexel ; Laurent Beuselinck, ERM-France ; Thierry Blandinières, InVivo ; Thierry Boisnon, Nokia-France ; Sophie Boissard, Korian ; Yannick Bolloré, Vivendi ; Jean-Laurent Bonnafé, BNP Paribas ; Christel Bories, Eramet ; François Brottes, RTE ; Thomas Buberl, AXA ; Laurent Burelle, Président de l’Afep ; Patrice Caine, Thales ; Bertrand Camus, Suez ; Heiko Carrie, Bosch-France ; Guillaume Charlin, BCG-France ; Jean-Marc Chéry, STMicroelectronics ; Jean-Pierre Clamadieu, Engie ; Benoît Coquart, Legrand ; Anne-Marie Couderc, Groupe Air France-KLM ; Christophe Cuvillier, Unibail-Rodamco-Westfield ; Philippe Darmayan, ArcelorMittal-France ; Pierre-André de Chalendar, Compagnie de Saint-Gobain ; Thierry de la Tour d’Artaise, Groupe SEB ; Augustin de Romanet, Groupe ADP ; Michel de Rosen, Faurecia ; Fabrice Domange, Marsh SA ; Pierre Donnersberg, Siaci Saint-Honoré ; Bertrand Dumazy, Edenred ; Emmanuel Faber, Danone ; Jean-Pierre Farandou, SNCF ; Guillaume Faury, Airbus ; Laurent Favre, Compagnie Plastic Omnium ; Antoine Flamarion, Tikehau Capital ; Antoine Frérot, Veolia ; Didier Gauthier, Chimirec ; Jean-Marc Germain, Constellium ; Jacques Gounon, Getlink ; Jean-Laurent Granier, Generali France ; Christopher Guérin, Nexans ; Catherine Guillouard, RATP ; Edouard Guinotte, Vallourec ; Paul Hermelin, Capgemini ; Thierry Herning, BASF-France ; Paul Hudson, Sanofi ; Xavier Huillard, Vinci ; Sylvie Jéhanno, Dalkia ; Ilham Kadri, Solvay ; Denis Kessler, SCOR ; Christophe Kullmann, Covivio ; Marianne Laigneau, Enedis ; Matthieu Lassalle, Primagaz ; Olivier Laureau, Servier ; Gilles Lecaillon, Ecocean ; Dominique Lefebvre, Crédit Agricole ; Jean-Yves Le Gall, CNES ; Thierry Le Hénaff, Arkema ; Jean-Bernard Lévy, EDF ; Eric Lombard, Caisse des Dépôts ; Pierre Magnes, Firmus France ; Nicolas Makowski-Kesic, Hudi ; Thierry Martel, Groupama ; Xavier Martiré, Elis ; Florent Menegaux, Michelin ; Didier Michaud-Daniel, Bureau Veritas ; Laurent Mignon, BPCE ; Dominique Mockly, Teréga ; Virginie Morgon, Eurazeo ; Frédéric Oudéa, Société Générale ; Bruno Pavlovsky, Chanel ; Jérôme Pécresse, GE France ; Yves Perrier, Amundi ; Jean-Luc Petithuguenin, Paprec ; Nicolas Petrovic, Siemens-France ; François Petry, LafargeHolcim France ; Robert Peugeot, FFP ; Olivier Peyret, Schlumberger SA ; Bruno Pillon, HeidelbergCement France ; François-Henri Pinault, Kering ; Benoît Potier, Air Liquide ; Henri Poupart-Lafarge, Alstom ; Patrick Pouyanné, Total ; Jean-Philippe Puig, Groupe Avril ; Benoît Rabilloud, Bayer-France ; Sami Rahal, Deloitte France ; François Riahi, Natixis ; Alexandre Ricard, Pernod-Ricard ; Stéphane Richard, Orange ; Bris Rocher, Groupe Rocher ; Geoffroy Roux de Bézieux, Président du Medef ; Romain Salza, ACQUA.eco/BioMicrobics France ; Frédéric Sanchez, Fives ; Joël Séché, Séché-Environnement ; Jean-Dominique Senard, Renault ; Guy Sidos, Vicat ; Nicolas Tiliacos, Prodibio ; Jean-Pascal Tricoire, Schneider Electric ; Philippe Varin, Orano, Président de France-Industrie (…)